PROJET DE LOI C-31 INJUSTICE ET VIOLATION DE DROITS DE FEMMES DEMANDEURES D’ASILE SURVIVANTES DE VIOLENCES SEXUELLES

Le nouveau projet de loi-31 fait suite à des projets de loi comme le projet de loi C-11, le projet de loi C-4 ainsi que le projet de loi C-49. Ces projets visaient à empêcher les trafics d’êtres humains, cependant pénalisent les demandeurs d’asile qui fuient la persécution dans leurs pays et plus particulièrement les femmes.
Ces mesures sont discriminatoires et arbitraires ne respectant pas les droits des réfugiés et des demandeurs d’asile tel que stipulé dans les droits internationaux en matière de réfugiés et des droits humains.  
Cette loi vise à identifier, tel qu’exprimé par le Ministre de l’immigration Monsieur Jason Kenney « les faux refugiés » cette loi donne au ministre des pouvoirs sans précédant face aux demandeurs d’asile créant des catégories de refugiés qui sont déterminés sur une base arbitraire. De plus, ces pouvoirs ne sont pas définis et il n’existe aucun mécanisme de surveillance judiciaire face aux abus ou négligences qui pourraient être commises.
Des éléments très important dans l’introduction de ce nouveau projet de loi de la part du gouvernement sont que cette loi est présentée dans un délai de temps très restreint (présentation du projet en février 2012) donnant peu de temps aux groupes de défense de droit de bien comprendre et d’analyser cette loi qui est très complexe. Un autre élément est l’intention de la part du gouvernement d’immobiliser les groupes de défense de droits à réagir  ainsi que d’éviter un vrai débat public.
Les violences et les agressions sexuelles : enjeux, bref survol
Quels sont les éléments qui nous préoccupent ?
1.       Pays d’origine désignés
2.       Révocation du statut de réfugié
3.     Des pouvoirs extraordinaires aux ministres de la Citoyenneté et de l’immigration et de la Sécurité publique
4.       Statut de la résidence permanent précaire
 
1. Entrevue dans les 15 jours, audience dans les 15 jours
Il est tout à fait inconcevable qu’une femme qui fuit le viol puisse passer une entrevue et dénoncer l’agression vécue.
« Lorsque les femmes refugiées ne dénoncent pas les agressions sexuelles subies, elles agissent comme de nombreuses femmes Canadiennes puisqu’au Québec : « En 2008-2009, près de la moitié des femmes rencontrées dans les CALACS ont attendu entre 6 et 12 ans avant de demander de l’aide. Les agressions sexuelles demeurent un grand tabou social. Les victimes éprouvent souvent de la honte et de la culpabilité à cause des mythes et des préjugés qui ont cours à leur égard et sur les agressions à caractère sexuel. » [1] 
Pourquoi le Canada exige-t-il des femmes réfugiées d’agir différemment des nombreuses femmes Canadiennes et ce, compte tenu du contexte peu sécuritaire et peu favorable à la dénonciation qu’est celui de nombreux pays ? 
Pourrions-nous appeler cela de la discrimination ?
Éléments à considérer
·Choc post-traumatique avec tout ce que cela comporte
·Méfiance, peur insécurité face à l’autorité (même si la commissaire ou l’agente est une femme)
·Etat de santé physique et psychologique
·Tous les mêmes traumas que les femmes canadiennes vivent lors des agressions sexuelles en plus du choc identitaire, de son parcours migratoire, de la crainte d’être retourné et faire face à la mort.
Nous avons rarement entendu au CISR dire que l’agression sexuelle est au cœur des analyses des demandes des femmes ayant été agressées sexuellement. La minimisation, l’oubli, la banalisation a été souvent le lot des survivantes et cela se continue dans tout le processus d’immigration. Davantage cette réalité sera vécue par les femmes lors des entrevues ainsi que le délais très courts.
1.          Pays d’origine désignés
Le projet de loi C-31 donne au Ministre le pouvoir de désigner quels seront les pays sûrs où il n’y a pas de demandeurs d’asile. Nous nous questionnons sur cette mesure à savoir sur quelle base le Ministre désignera les pays sûrs. « y-a-t’il des éléments économiques qui rentrent en compte, tels les accords commerciaux avec différents pays » Quels critères seront évalués sur des pays comme par exemple le Mexique où la corruption, la négligence et l’impunité se traduisent sur les corps des femmes violées et tuées.
2. Des pouvoirs extraordinaires aux ministres de la Citoyenneté et de l’immigration et de la Sécurité publique (Visé pour contrer le trafic humain)
Ce projet de loi permet aux différents ministères de catégoriser les demandeurs d’asile comme des passeurs (passage clandestin) et ce dès qu’il y a deux personnes ou plus à passer les frontières.   Pour des femmes, il nous semble très flou ce qui arriveras à ces personnes. 
a)       Une année de détention obligatoire sans aucune possibilité de révision
b)       Une pénalité de 5 ans d’attente avant pouvoir appliquer pour la réunification familiale
3. Statut de la résidence permanent précaire
Le nouveau projet de loi octroi au Ministre le droit de révoquer le statut de réfugié à une personne à tout moment si à son avis le pays de provenance est considéré un pays sûr. 
Sommaire de recommandations
Le Mouvement contre le viol et l’inceste demande :
1.        Que le projet de loi C-31 soit retiré
2.         Que toute nouvelle loi d’immigration renferme l’obligation, pour les décideurs du statut des femmes survivantes de violences et des agressions sexuelles de respectent les recommandations du Haut Commissariat des réfugiés[2] :
§ Recommande que dans les procédures de détermination du statut de réfugié les demandeurs d’asile qui peuvent avoir été victimes d’agressions sexuelles soient traités avec une sensibilité particulièreConclusion du Comité exécutif N° 73 (XLIV) (1993), paragraphe g). La protection des réfugiés et la violence sexuelle
§ Dans ce contexte, il est essentiel que les fonctionnaires chargés de la détermination du statut de réfugié soient conscients des conséquences traumatiques éventuelles (voir, par exemple, le point 3.9 a), Réactions psychologiques communes, à la page 48) et des divers schémas culturels de comportement et de langage. C’est par euphémisme qu’une demandeuse d’asile peut déclarer avoir été « maltraitée ». La formation des fonctionnaires concernés est donc hautement recommandée.   Conclusion du Comité exécutif N° 73 (XLIV) (1993), paragraphe j). La protection des réfugiés et la violence sexuelles.
3.        Que leurs décisions respectent la résolution 1820 de l’ONU[3] :
§ « le viol est une forme de violence sexuelle qui peut, dans certains cas, subsister après la fin des hostilités »
§ « le viol et toute autre forme de violence sexuelle peuvent constituer « un crime de guerre, un crime contre l’humanité ou un élément constitutif du crime de génocide »
4.        Désignation de pays d’origine. 
·         Supprimer les dispositions concernant les pays d’origine désignés
·         Prendre en considération les risques de renvoi sur des pays considérés sûr mais où  la corruption et l’impunité  des autorités responsable de la protection de ses citoyens viennent à l’encontre de la protection des réfugiés et la violence sexuelle.
5.        L’entrevue devant la Commission de l’immigration et du statut de réfugié
·         Que toute nouvelle loi sur les réfugiés tienne compte de l’état et de la situation particulière dans laquelle la demandeure d’asile se trouve ;
·         Que le CISR traite ces demandes en prenant en compte des expériences traumatisantes vécues par ces femmes
·         Que les membres du CISR soient formés à l’analyse différenciée selon le sexe
·         Que les membres du CISR considèrent dans leur analyse et décisions la situation réelle des femmes dans les divers pays d’origine


[1] Regroupement québécois des centres d’aide et de lutte contre les agressions sexuelles : http://www.rqcalacs.qc.ca/public/communiqu%C3%A9/Denoncer_ce_n_est_pas_la_seule_facon_d_aider
[2] Haut Commissariat des réfugies : Violence sexuelle à l’encontre des réfugiés – Principes directeurs concernant la prévention et l’intervention. http://helid.desastres.net/fr/d/Jh0199f/7.3.html
[3] L’ONU fait du viol un crime contre l’humanité. http://www.lepoint.fr/actualites-monde/2008-06-20/l-onu-fait-du-viol-un-crime-contre-l-humanite/924/0/254740